Chanson : Filles d'ouvriers - Michèle Bernard
Filles d'ouvriers
Paroles : Jules Jouy
Musique : Gustave Goublier
Pâle ou vermeille, brune ou blonde,
Bébé mignon,
Dans les larmes ça vient au monde :
Chair à guignon !
Ebouriffée, suçant son pouce,
Jamais lavée,
Comme un vrai champignon ça pousse :
Chair à pavé !
A quinze ça rentre à l’usine,
Sans éventail.
Du matin au soir ça turbine :
Chair à travail !
Fleur des fortifs ça s’étiole,
Quand c’est girond,
Dans un guet-apens ça se viole :
Chair à patrons !
Jusque dans la moelle pourrie,
Rien sous la dent ;
Alors ça rentre en brasserie :
Chair à clients !
Ça tombe encore, de chute en chute,
Honteuse un soir,
Pour un franc ça fait la culbute :
Chair à trottoir !
Ça vieilli et plus bas ça glisse,
Un beau matin,
Ça va s’inscrire à la police :
Chair à roussins !
Ou bien sans carte ça travaille
Dans sa maison,
Alors ça se fout sur la paille :
Chair à prison !
D’un mal souffrant le supplice
Vieux et tremblant,
Ça va geindre dans un hospice :
Chair à savants !
Enfin, ayant vidé la coupe,
Bu tout le fiel,
Quand c’est crevé ça se découpe :
Chair à scalpel !
Patrons, tas d’Héliogabales !
D’effroi saisis,
Quand vous tomberez sous nos balles,
Chair à fusils !
Pour que chaque chien, sur vos trognes,
Pisse à l’écart,
Nous laisserons sur vos charognes :
Chair à Macquart !
Bébé mignon,
Dans les larmes ça vient au monde :
Chair à guignon !
Ebouriffée, suçant son pouce,
Jamais lavée,
Comme un vrai champignon ça pousse :
Chair à pavé !
A quinze ça rentre à l’usine,
Sans éventail.
Du matin au soir ça turbine :
Chair à travail !
Fleur des fortifs ça s’étiole,
Quand c’est girond,
Dans un guet-apens ça se viole :
Chair à patrons !
Jusque dans la moelle pourrie,
Rien sous la dent ;
Alors ça rentre en brasserie :
Chair à clients !
Ça tombe encore, de chute en chute,
Honteuse un soir,
Pour un franc ça fait la culbute :
Chair à trottoir !
Ça vieilli et plus bas ça glisse,
Un beau matin,
Ça va s’inscrire à la police :
Chair à roussins !
Ou bien sans carte ça travaille
Dans sa maison,
Alors ça se fout sur la paille :
Chair à prison !
D’un mal souffrant le supplice
Vieux et tremblant,
Ça va geindre dans un hospice :
Chair à savants !
Enfin, ayant vidé la coupe,
Bu tout le fiel,
Quand c’est crevé ça se découpe :
Chair à scalpel !
Patrons, tas d’Héliogabales !
D’effroi saisis,
Quand vous tomberez sous nos balles,
Chair à fusils !
Pour que chaque chien, sur vos trognes,
Pisse à l’écart,
Nous laisserons sur vos charognes :
Chair à Macquart !
Résumé
Cette chanson décrit une vie d'ouvrière semée de malheurs (viol, alcool, prostitution...) depuis son exploitation à l'usine ("chair à travail") jusqu'à sa déchéance physique ("chair à scalpel"). Véritable appel à la révolte, elle dénonce les conditions de vie des ouvrières et condamne le patron, le comparant au tyran Héliogabale, empereur romain dont le règne fut une suite de persécutions et qui finit assassiné par sa garde prétorienne.
Jules Jouy (1855-1897) est à l’origine de textes de chansons s'inspirant des faits d'actualité, destinés à être publiés dans les journaux socialement engagés comme Le cri du peuple ou Le parti ouvrier. La chanson ouvrière est à l'époque un genre si répandu que de nombreux compositeurs s'y exercent. Ainsi, Gustave Goublier, chef d'orchestre à l'Eldorado, puis aux Folies Bergères, accepte-t-il tout naturellement d'écrire la musique de ce texte.
Cette chanson fait partie d'un CD intitulé "Anthologie de la chanson Française", enregistré en 1994. C'est l'un des rares chants dénonçant la condition des femmes du milieu ouvrier au 19e siècle.
Extrait à écouter : http://lehall.com/galerie/journeefemme/images/sons/1/Fille%20d%27ouvrier.wma
Cette chanson décrit une vie d'ouvrière semée de malheurs (viol, alcool, prostitution...) depuis son exploitation à l'usine ("chair à travail") jusqu'à sa déchéance physique ("chair à scalpel"). Véritable appel à la révolte, elle dénonce les conditions de vie des ouvrières et condamne le patron, le comparant au tyran Héliogabale, empereur romain dont le règne fut une suite de persécutions et qui finit assassiné par sa garde prétorienne.
Jules Jouy (1855-1897) est à l’origine de textes de chansons s'inspirant des faits d'actualité, destinés à être publiés dans les journaux socialement engagés comme Le cri du peuple ou Le parti ouvrier. La chanson ouvrière est à l'époque un genre si répandu que de nombreux compositeurs s'y exercent. Ainsi, Gustave Goublier, chef d'orchestre à l'Eldorado, puis aux Folies Bergères, accepte-t-il tout naturellement d'écrire la musique de ce texte.
Cette chanson fait partie d'un CD intitulé "Anthologie de la chanson Française", enregistré en 1994. C'est l'un des rares chants dénonçant la condition des femmes du milieu ouvrier au 19e siècle.
Extrait à écouter : http://lehall.com/galerie/journeefemme/images/sons/1/Fille%20d%27ouvrier.wma